- Dossier "Migrations et Luttes Sociales", La Revue Nouvelle, n°6-7, juin-juillet 2014 (http://www.revuenouvelle.be/2014-06-7) (AUTEURS: Bachir Barrou(SPBelgique)/Andrew Crosby(ULB)/Martin Deleixhe(KUL)/Florence Delmotte(USLB)/Denis Duez(USLB)/ Elodie Francart(ULB)/Sophie Klimis(USLB/Grégory Meurant/Léila Mouhib(ULB)/ Camille Reyniers(ULB)/ Youri Lou Vertongen(USLB))
- Carte blanche, diffusée dans La Libre Belgique, 28 octobre 2014 et republié dans l'ouvrage « Visages Humains » aux éditions Le Chant des Rues (Bruxelles, 2015). SIGNATAIRES: Martin Deleixhe (KUL), Leila Mouhib (ULB), Youri Lou Vertongen (USL-B)), Bachir Barrou (SPBelgique), Elsa Roland (ULB), Elisabeth Dubois (ULB), Elodie Francart (ULB), Camille Reyniers (ULB), Nicolas Dekemel (Collectif Créole), Rachida El Baghdadi (Collectif Créole), Martin Vander Elst (Collectif Créole).)
- Mémoire, « Agir politique dans les pratiques minoritaires : l'expérience micropolitique du Comité d'Actions et de Soutien aux « sans-papiers » de l'ULB, entre devenir-minoritaire et devenir-moléculaire », mémoire pour l'obtention du Master en Sciences Politiques à l'Université libre de Bruxelles (ULB). AUTEUR: Youri Lou Vertongen (Disponible dans les archives de la bibliothèque de l'ULB ou en version électronique sur demande à l'auteur).
- Article, « L'invention démocratique dans les pratiques minoritaires. Le cas du Comité d'Actions et de Soutien aux « sans-papiers » de l'ULB. Enthousiasme et subjectivation collective. », Revue Multitudes, n°55, printemps 2014, Paris. AUTEUR: Youri Lou Vertongen
- Article, “Lecture critique de « Asile et migration en Belgique (II) : Changer la figure du migrant”, article publié sur le site de l'Association Culturelle Joseph Jacquemotte (ACJJ), Février 2014. AUTEUR: Youri Lou Vertongen
- Article, Martin Deleixhe, « L'hospitalité, égalitaire et politique ? », Revue Asylon(s), vol. 13, « Trans-concepts, lexique théorique du contemporain », novembre 2014.
« Migrations et luttes sociales » est un groupe de réflexionS qui centre son attention sur les questions migratoires abordées à travers le prisme de la mobilisation sociale des migrants et de leurs soutiens.
jeudi 26 février 2015
Publications
Journée d'étude: "Penser/pénsées en mouvements"
Si vous l'avez manquée, voici (enfin) la vidéo de la journée d'étude "Migrations et Luttes Sociales: Pensées/penser en mouvement(s)", du 15 mai 2014 à l'Université Saint-Louis Bruxelles.
Session 1:
Session 2:
Session 3:
|
Carte Blanche et réactions publiques
Il ne faut pas dénoncer la politique migratoire, il faut lui opposer une résistance
Carte blanche, diffusée dans La Libre Belgique, 28 octobre 2014 et republié dans l'ouvrage « Visages Humains » aux éditions Le Chant des Rues (Bruxelles, 2015).
Quiconque
a lu, même distraitement, la presse ces derniers jours aura fait la
connaissance de notre nouveau secrétaire d’État à la politique
migratoire, Théo Francken, et aura pu se faire sa propre opinion sur
la finesse des analyses sociologiques qu’il aime à délivrer sur
les réseaux sociaux. Un « humour » que l'intéressé a
qualifié de potache, mais que nous préférerons désigner ici
d'indigne de la fonction. Les appels à sa démission qui émanent de
toutes parts dans les rangs de l'opposition apportent une pugnacité
bienvenue au débat démocratique et rappellent, à qui l'aurait
oublié, qu'on ne peut si facilement faire étalage public d'une
lecture racialiste du monde et prétendre dans un même temps
administrer avec justice la politique migratoire.
Oui, Théo Francken a
tout d'un personnage détestable ! Et l'unanimité qu'il a
rapidement faite contre lui ferait plaisir à voir si nous ne la
soupçonnions teintée d'hypocrisie ! Car, en centrant le débat
autour de la seule personnalité du secrétaire d’État, on
obscurcit le fait que l'accord de gouvernement de la coalition
« suédoise » se contente finalement de radicaliser une
logique anti-immigré qui avait déjà pris ses quartiers au sommet
de l'Etat avec la complicité des partis qui siègent aujourd'hui
dans l'opposition.
Ainsi, le monde
associatif dénonce, et il a raison de le faire, la très lourde
emphase qui est mise dans le nouvel accord de gouvernement sur la
lutte contre les abus. Le volet consacré à l'asile et l'immigration
peut effectivement se lire comme un catalogue de nouvelles mesures
visant à surveiller, contrôler et contraindre les faits et gestes
des migrants, qui seraient apparemment tous venus en Belgique avec
les pires intentions.
Or, cette logique de la
suspicion vis-à-vis des migrants n'est pas neuve. L'orientation
répressive de la politique migratoire est en réalité une constante
en Belgique depuis la crise économique des années 1970 et la
fermeture théorique des frontières. La nouveauté, c'est que cette
logique est ici poussée à son paroxysme. La majeure partie du texte
se consacre à définir les mesures qui seront mises en œuvre pour
maximiser la capacité d'accueil des centres
fermés (« camps pour étrangers »), dans lesquels, il
est important de le rappeler sans cesse, des personnes n'ayant commis
aucun délit sont privées de leur liberté. La liste des mesures
désastreuses pour le respect des droits des migrants est longue :
privatisation des centres d'accueil, confusion entre « retour
volontaire » et retour consenti sous la contrainte,
développement assumé des « retours forcés » (et ce,
malgré leur potentiel meurtrier), restriction des procédures
d'appel, légitimation de la double peine, violation du droit à la
vie privée des migrants, surveillance généralisée des personnes,
droit de séjour conditionné par des questions d’ordre public et
de sécurité nationale... On notera également le peu de
considération pour la vie de famille des migrants : ces
derniers, au contraire de la majorité du genre humain, ne se
marieraient et ne feraient des enfants que
dans le but d'abuser du système social belge… Si les « abus »
dans le chef des migrants sont au centre de toute la note de
gouvernement, rien n’est dit en revanche des « abus »
commis par le patronat. Les sans-papiers qui travaillent pour un
salaire de misère sur nos chantiers, à la plonge dans nos
restaurants, ou au nettoyage de nos grands hôtels sont pourtant bien
embauchés par quelqu’un…
Ces
mesures, comme si elles ne se suffisaient pas à elles-mêmes,
s’accompagnent d’effets d'annonces médiatiques sur la prétendue
« nécessité » d’augmenter le nombre de places en
centres fermés et d’accélérer les expulsions. Ce show
spectaculaire
et décomplexé correspond à une volonté de renforcer un discours,
déjà bien ancré dans la conscience collective, sur le migrant en
tant que menace pour le corps politique et social (on n’oserait
dire « pour la nation »), et d'en faire un enjeu de
crédibilité politique pour ce gouvernement.
Mais, il est important de
le répéter, attribuer l'entière responsabilité de ce glissement
vers une politique migratoire envisagée exclusivement sous un angle
« policier » à la seule coalition suédoise serait faire
preuve d'un manque de discernement. Une lame de fond réactionnaire
et xénophobe traverse en ce moment l'Europe toute entière. Et de
plus en plus de gouvernements préfèrent flatter l'aile la plus
droitière de leur électorat plutôt que de lutter pour déconstruire
les argumentaires qui jouent sur la peur des étrangers.
L'exemple le plus
marquant est la dernière initiative en date prise par les Etats de
l'Union Européenne : Mos Maiorum. Cette vaste opération
de police, coordonnée à l'intérieur de l'Espace Schengen par la
présidence italienne de l'UE, entre le 13 et le 26 octobre, vise à
repérer et démanteler des réseaux d'immigration trans- et
intra-européenne. Le but ? Massifier les arrestations de
migrants « sans-papiers » sous couvert de lutte contre le
trafic d'êtres humains, identifier au moyen d’une gigantesque
chasse à l'homme les organisations qui facilitent l'immigration,
mais également repérer, identifier et ficher sciemment les
parcours, les trajectoires et les outils empruntés par les migrants
pour pénétrer sur le sol européen. Il est ainsi explicitement
demandé aux pays participants à cette opération de noter, pour
chaque migrant-e interpellé-e le profil
(nationalité, genre, âge, point et date d’entrée en Union
européenne) ; les chemins empruntés pour accéder en Europe ;
le modus operandi (faux papiers, demande d’asile, qui est le
passeur, nationalité et pays de résidence des facilitateurs, somme
versée par chaque immigrant, ...). Les arrestations de ce mois
d'octobre fourniront aux autorités européennes de nouveaux outils
pour mieux prévoir, anticiper et empêcher toute nouvelle forme
d’immigration future.
Le
nom donné à l’opération est d’ailleurs révélateur de ses
intentions profondes. Mos Maiorum est
une expression latine qui évoque les « mœurs des Anciens »,
c’est-à-dire le code moral de la Rome antique dont la pierre de
touche était le respect des aînés et de la tradition. Cette
dénomination vend incidemment la mèche. L’opération ne vise donc
pas tant à endiguer le trafic d’êtres humains qu’à restaurer
en Europe, symboliquement du moins et le temps d’une rafle, un
ordre ancien et mythique fait de valeurs communes, de mœurs
civilisés (opposées à demi-mots au désordre décadent des
Barbares à nos portes) et d’identité traditionnelle.
Les mesures de
restriction et de criminalisation de la coalition « suédoise »,
ainsi que ces opérations de traque et de rafle à l'échelon
européen, font partie à notre sens d'une même logique raciste et
répressive. Elles exigent de notre part une réaction : pas
uniquement une indignation bienveillante, mais bien une prise de
position en faveur des processus de résistance qui tentent de mettre
à mal de telles procédures. Nous
condamnons une politique migratoire nauséabonde et criminelle,
mais nous ne voudrions pas que cette démarche
se limite à un sermon séculier. Elle doit pour nous aller de pair
avec un engagement pratique de tous et toutes, migrant-e-s ou non,
qui refusent de cautionner l’intolérable. Contestation,
désobéissance civile, solidarité et exigence radicale d’égalité
sont les maîtres mots de la résistance indispensable à la
politique migratoire.
Nous
appelons à intensifier ces mécanismes de résistance : en
soutenant les migrants qui luttent, notamment dans les églises et
les bâtiments occupés ; en prévenant les familles en passe
d'être raflées ; en hébergeant les personnes traquées ou
menacées d’expulsion ; en aidant les migrants à franchir les
frontières ; en refusant de ne pas voir ; en apportant
notre aide aux personnes contrôlées dans la rue et les transports
en commun ; en refusant les camps pour étrangers ; en
s'opposant physiquement aux expulsions, dans les aéroports ou dans
les avions ; en dénonçant tous les complices de la
machine-à-expulser...
Mille
autres techniques et stratégies, plus ou moins microscopiques, plus
ou moins explicites sont encore à inventer et à expérimenter.
Papiers
pour tous ou tous sans papiers !
Le Groupe de réflexion
« Migrations et Luttes sociales » : Martin
Deleixhe (KUL), Leila Mouhib (ULB), Youri Lou Vertongen (USL-B)),
Bachir Barrou (SPBelgique), Elsa Roland (ULB), Elisabeth Dubois
(ULB), Elodie Francart (ULB), Camille Reyniers (ULB), Nicolas Dekemel
(Collectif Créole), Rachida El Baghdadi (Collectif Créole), Martin
Vander Elst (Collectif Créole).
Inscription à :
Articles (Atom)